Biographie
Emmanuelle Tremblay est poète, romancière et traductrice. Née au Saguenay-Lac-Saint-Jean, elle vit actuellement sur l’île de Lamèque. Depuis 2013, sa pratique d’écriture interroge la violence de l’arrachement à soi par un regard féministe porté sur les origines et le désir d’appartenir au monde.
Aux Éditions du Noroît, elle fait paraître une traduction des essais du poète mexicain Pedro Serrano : Pare-Chocs. Essais d’autodéfense poétique (2020). Troisième lauréate du prix de poésie Geneviève-Amyot 2020, avec la suite « L’enfance à cinq cennes », elle a publié deux recueils : Mesurer les combles (2015) et Nous le lac (2022). Ce dernier livre offre à lire un récit autobiographique sur le devenir femme, d’un espace prénatal à l’âge adulte, avec une attention particulière portée aux périodes de l’enfance et de l’adolescence. Il a été récompensé par le Prix du Salon du livre du Saguenay-Lac-Saint-Jean (catégorie poésie / théâtre).
Entrevue
L’école a été malheureusement pour moi un désert poétique. J’aimerais y retourner aujourd’hui pour apprendre un poème par cœur. Mais il y a tout de même eu un éclat : Déjeuner du matin, de Jacques Prévert. Un miroir pour ma solitude d’adolescente.
Après le CEGEP, j’ai découvert Hélène Monette qui récitait des poèmes dans les nuits montréalaises. Sur les bancs de l’université, Gauvreau. Puis j’ai été captivée par les poèmes de Borges, Neruda et Mutis. Je voulais vivre ailleurs.
J’ai longtemps fait le geste de gribouiller dans des carnets. J’écrivais des choses illisibles, en réalité. Ce qui m’apparaît aujourd’hui correspondre à une quête d’espace propre, dans une langue autre, à venir. Ce n’est qu’en plongeant dans l’écriture de Nous le lac que j’ai trouvé une sorte d’ancrage dans une texture de mots, peut-être parce que ce livre m’a ramenée à ma langue maternelle, à la langue perdue de l’enfance, de ma région d’origine. Je ne sais pas. Bref, c’est plutôt tardivement, dans la quarantaine, que la poésie m’est apparue comme un possible dont j’ai fait le choix.
La poésie permet de rendre présent ce qui nous manque ou de nous rappeler à ce qui, en nous, est fragile, voire est menacé. Les poètes sont donc, pour moi, des bouées de sauvetage. Sans eux, sans elles, on coule.
En choisir un seul m’est impossible. Je tricherai donc. En plus de ceux de Marie Uguay et d’Hélène Monette (parce que ces poètes sont mes deux essentielles), j’aimerais réciter « la spelling bee » de Georgette Leblanc. Pour la vie qui grouille dans la langue et le fun que ça donne.